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Dimanche des Rameaux (C)

24 mars 2013

Suivre le Christ dans son dépouillement

Philippiens 2, 6-11

Laurent Dupont

En ce Dimanche des Rameaux, l’apôtre Paul dans son hymne (poème) aux Philippiens nous fait contempler tout ensemble les abaissements et la glorification du Christ.
Comme s’il nous demandait au seuil de la Semaine Sainte de suivre le Christ dans son dépouillement pour mieux le rejoindre dans sa gloire.   

Les “abaissements” de Jésus Christ (1er mouvement descendant de l’hymne), qu’est-ce à dire? Jésus a accepté intégralement notre condition et la croix. Nous mesurons ainsi toute l’étendue de son renoncement et de ses humiliations. Si bien que la souffrance de Jésus et celle des êtres humains appartiennent à un même mystère. Jésus est au centre de ce royaume désolé de la souffrance humaine et il la fait sienne… parce qu’il est celui qui a souffert le plus injustement, mais aussi parce qu’il a une sympathie, une tendresse et une compassion immenses pour ceux qui souffrent et avec lesquels il communie… Ainsi, l’humanité souffrante et Dieu sait qu’elle est souffrante, devient un signe, un sacrement humain qui voile la présence mystérieuse de Jésus. N’en doutons pas : Jésus est en toute personne qui souffre… pour partager, soutenir, encourager, et adoucir les souffrances, mais aussi pour les associer aux siennes et ainsi les faire porter du fruit.         

Ce qui nous comble de stupeur et nous laisse bouche bée, ce n’est pas tant le fait brut de l’incarnation, mais les conditions dans lesquelles elle s’accomplit. Bien sûr, le Christ aurait pu se faire homme, sans rejeter certaines de ses prérogatives filiales, sans rejeter la gloire dont son humanité aurait dû être comblée. Il a pris, au contraire, notre condition humaine dans cette privation même de tout privilège qui la soustrairait à l’humiliation, aux souffrances, à la mort. Le Christ est venu dans le monde et n’a voulu apparaître aux yeux de ses contemporains que sous l’aspect de l’un d’entre eux.          

Il était Dieu, et l’on ne voyait en Lui que l’homme; Il était le Seigneur, et il a accepté notre état de servitude, hormis le péché.        
Pour aller au bout de l’incarnation, il fallait que Jésus pût souffrir et mourir.         
Or précisément, pour ménager ces possibilités de « rédemption », de « salut » dans la souffrance et la mort, le Christ renonça librement pour lui-même à « l’égalité avec Dieu », c’est-à-dire au statut supérieur d’une humanité transfigurée et glorifiée.        

Tel est l’exemple d’humilité que Paul demande aux chrétiens de Philippe d’imiter. L’humilité du Christ le rendit “obéissant” jusqu’à la mort, fidèle à sa mission de sauveur qui l’orientait dès le début de son existence vers son immolation. Mais il lui fallait attendre « l’heure fixée par le Père » pour l’accomplissement du salut. 

Disons-le en passant, l’obéissance a bien mauvaise presse, car elle semble la vertu des faibles. Pourtant elle a toujours fait partie du cœur même du mystère chrétien. L’hymne aux Philippiens en souligne l’importance dans le déroulement de la Passion jusqu’à la mise en croix.        

Mais déjà à Nazareth, l’obéissance marquait toute la vie de Jésus, sans parler de sa constante conformité à la volonté du Père.      
Jésus accepta la mort sur une croix, le supplice infamant de l’esclave.         

Mais avec la mort de Jésus sur la croix, c’est précisément là que commence la remontée du Jésus dans l’hymne liturgique de Paul : au plus bas, au plus creux de son dépouillement Jésus trouve sa glorification, son exaltation. La Résurection et l’Ascension de Jésus témoignent avec éclat que le don et l’offrande de sa vie ont été agréés de Dieu. De sorte que, plus qu’une renommée, Jésus reçoit le Nom qui surpasse tous les noms; et plus que de recevoir le nom par exellence, il devient le centre même de l’Univers devant qui tombe à genoux tout être vivant dans les cieux, sur la Terre et dans l’abîme; et encore plus explicitement que le centre de l’Univers, il doit être dit et proclamé Seigneur, ce qui affirme et confirme sans doute sa divinité à l’égal de celle du Père. 

Et voilà Jésus revenu au sommet de l’hymne d’où il était parti. En d’autres mots, le même Paul dira aux Éphésiens : “Celui qui est descendu, c’est le même qui est aussi monté au-dessus de tous les cieux, afin de remplir toutes choses.  

À bien y penser dans la foi et l’espérance, le voyage de Jésus sur Terre, son itinéraire liturgique de haut en bas puis de bas en haut, c’est le mystère même que chaque être humain est appelé à revivre et à approfondir.     
Bien moins savante que l’hymne aux Philippiens une phrase de Jésus nous invite à l’approfondissement : « Si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il reste seul; s’il meurt, il porte beaucoup de fruit ».

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal