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Communauté chrétienne St-Albert le Grand





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Dimanche des Rameaux (A)

5 avril 2020

En ce temps de pandémie, comment accueillir Jésus, avec des cris de joie et chanter Hosanna?

Matthieu 21, 1-11

Hubert Doucet

 

Hubert Doucet      

Connecté à l’air du temps, j’ai cru bon m’aventurer sur internet pour rechercher comment diverses communautés chrétiennes célèbrent le dimanche des Rameaux et comment les commentateurs et commentatrices de ce passage de l’évangile nous le présentent.     

Hubert DoucetRapidement, je me suis rendu compte qu’ici à Saint-Albert nous accordons une place centrale à la fête même des Rameaux. Celle-ci est le cœur de notre célébration. Dans beaucoup de lieux, elle est plutôt une introduction à la lecture de l’évangile de la passion selon Saint-Matthieu qui occupe la majeure partie de la célébration. L’importance que notre communauté accorde à l’hommage que la foule de Jérusalem rend à Jésus aide à comprendre pourquoi la question qui nous est posée aujourd’hui nous rejoint tant : « En ce temps de pandémie, comment accueillir Jésus, avec des cris de joie et chanter Hosanna? »    

Nous avons l’habitude de célébrer ce dimanche de manière joyeuse parce que grandes sont notre foi et notre espérance en Jésus venu guérir l’humanité blessée et lui redonner la vie. Aujourd’hui, cette confiance est gravement mise à mal. Ce Dieu d’une immense bonté, le « bon Dieu », celui qui est pour nous une valeur infinie, où est-il ? Nous a-t-il abandonnés? Ce que vit l’humanité en ce moment même n’est-il pas plus proche du Vendredi saint que du triomphe des Rameaux? Nous sommes plongés au cœur du scandale du mal. 

Le triomphe des Rameaux est au cœur de notre désir. Chacun, chacune, nous avons besoin comme personne et comme humanité de chanter la possibilité de vaincre le mal qui est là. Nous cherchons des figures positives qui soutiennent l’espoir d’un progrès en humanité. C’est ce que faisait la foule de Jérusalem ce jour-là. Ce prophète ne portait-il pas en lui l’espoir qui animait ces hommes et ces femmes croyant que ce monde pourrait enfin devenir bon? Ces derniers ne pouvaient que l’acclamer et chanter Hosanna.           

Quelques jours plus tard, ces mêmes gens se retourneront contre celui qu’ils acclamaient le dimanche précédent. Étaient-ils devenus mauvais? Je ne crois pas, ils étaient toujours les mêmes, habités des mêmes rêves. Ce dimanche-là, ils n’avaient cependant pas saisi ce qu’impliquait la manière d’être de Jésus : amour et don et non puissance et force. Leur héros leur avait pourtant donné certains signes. N’avait-il pas fait son entrée assis sur un âne et non sur un cheval éclatant de force? Quelques jours plus tard, lorsque la force brutale brisera Jésus, cette foule, y compris ses disciples, ne pourra le suivre dans la voie du don de sa vie pour guérir la création.          

Cette interprétation nous invite-t-elle à comprimer le côté festif des Rameaux au profit de celui souffrant qui s’annonce? Je ne pense pas. L’humanité, toute la création même, aspire à la guérison, même si celle-ci peut être interprétée de diverses manières. Ce désir doit être célébré, témoignant de l’espérance qui nous habite. N’est-ce pas d’ailleurs ce qui se passe en ce temps de pandémie, avec les multiples initiatives qui surgissent de partout pour proclamer que la vie n’est pas morte? Ces diverses initiatives de vie poursuivent les multiples engagements dont témoigne l’histoire de l’humanité en pareilles circonstances.         

La guérison espérée ne prendra cependant sa pleine signification qu’en suivant les traces de Jésus offrant sa vie par amour pour toute l’humanité. Le don qu’il fit de lui-même aura comme conséquence de se sentir abandonné de tout, même de son Père jusqu’à ce que, au troisième jour, Jésus ressuscite d’entre les morts et ouvre à tous et toutes la voie de la résurrection.

Oui, nous pouvons faire nôtre la fête des Rameaux. Elle témoigne de notre désir de vie. Elle n’est cependant qu’une étape vers une fête plus belle, celle de la résurrection à la vie. Cependant, cette résurrection ne deviendra nôtre que si nous accueillons l’expérience de Jésus assumant, à un point extrême, le mystère de la souffrance humaine.