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9 avril 2017
Luc Chartrand
Philippiens 2, 6-11 (chanté par Claude-Marie)
Jésus aurait pu entrer directement à Jérusalem, mais il choisit de faire un arrêt à Bethphagé. De cet endroit, il envoie deux disciples dans le village d’en face. Ici, notre curiosité est mise à l’épreuve, puisque nous n’avons aucune information sur ce lieu. La mission confiée est de trouver, de détacher et de ramener une ânesse et un ânon. Le pourquoi de la démarche se résume à une affirmation : « Le Seigneur en a besoin ». Ce n’est pas la première fois que les disciples sont envoyés deux par deux. Une mission à deux personnes pour se rappeler que la démarche est en relation avec un autre, le Maître. Ce matin, il y a plus. La mission que les deux disciples reçoivent les associe à ce que Jésus vit concrètement. Il ne s’agira pas de revenir pour rapporter en paroles ce qui s’est passé. Le nécessaire se trouve devant. Les disciples l’expérimentent. Ils prendront avec leur Maître la route vers Jérusalem.
La séquence des événements se déroule comme Jésus leur avait dit. L’évangéliste Mathieu y introduit une citation du Prophète Zacharie. Ici, les « mots dits » à travers le Prophète, « Dites à la fille de Sion, voici ton roi… », trouvent un accomplissement. Le roi présente des caractéristiques étonnantes. En premier lieu, son humilité, qui s’apparente plus à la douceur qu’à l’humilité. Deuxièmement, sa monture. Des bêtes de somme, dont la raison d’être n’est pas d’être au service d’un roi. En plus, il y en a deux. On s’imagine mal Jésus en position instable, à la fois assis sur l’ânesse et l’ânon. L’arrêt, en ce lieu inconnu près de Bethphagé, vient ralentir l’arrivée triomphale de Jésus avec ses disciples et la foule à Jérusalem. L’ânesse et l’ânon viennent insérer ladimension de la fragilité, le plus jeune étant dépendant de la générosité maternelle. La prophétie que Jésus est en train d’accomplir modifie la figure du roi que nous nous faisons.
La prophétie est accomplie. Les disciples ont déposé leurs manteaux sur l’ânesse et l’ânon sur lesquels Jésus est assis. De son côté, la foule se dévêt de son manteau pour le disposer sur la route que fouleront les pas des bêtes. À ces vêtements s’ajoutent des branches, des éléments de la nature. Jésus est comme enchâssé entre des vêtements appartenant aux disciples et d’autres à la foule. Rien ne semble normal. L’Évangile n’est pas là pour reproduire ce qui est de l’ordre des choses, mais nous introduire au royaume des cieux, en utilisant ce qui recouvre les corps et les éléments de la nature pour énoncer une parole de vérité. Jésus accomplit la représentation d’un roi, mais manifestement ne l’est pas à la manière dont nous l’imaginons. Ce qui apparait dans le récit de l’Évangile de ce matin, c’est quelqu’un qui tient ensemble l’ânesse et l’ânon, les vêtements et les branches d’arbres. Jésus est Celui qui rassemble. C’est ici que prend forme la figure royale de Jésus. Un roi qui est tout le contraire d’une autorité puissante entrant dans la ville. Jésus se présente avec les attributs de la fragilité et de la pauvreté humaines. En se départissant de leur manteau, les disciples et la foule se font pauvres. Jésus revêt cette indigence. Sans s’en rendre compte, ils ont saisi intimement ce que signifiaient l’ânesse et l’ânon.
Les disciples et la foule acclament Jésus, mais derrière les paroles du Psaume, « Hosanna au fils de David! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! Hosanna au plus haut des cieux », quelque chose de plus important se manifeste. Les vêtements dont se sont dépouillées les personnes pour faire un tapis aux animaux et en revêtir leur dos sont les indices que la parole commence à faire son chemin. À preuve, malgré les acclamations qui attestent une reconnaissance, Jésus va être arrêté et malmené. Celui qui est entré sur l’ânesse et l’ânon n’a pas été compris. La fête a été de courte durée. Depuis ce jour, nous sommes en quête d’une fête éternelle… qui cherche son chemin à travers nos existences en ce monde. Au-delà des paroles, Jésus consent à l’événement qui se manifeste à lui. Les disciples et la foule y font un apprentissage par des voies différentes qui n’auront jamais de fin. Consentir à entrer à Jérusalem dans le tumulte, la réjouissance et les éclats de voix, alors que la suite du récit conduit à la mort, c’est prendre la route vers Jérusalem, qui conduira à Pâques.