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L'Évangile de Matthieu de ce matin nous présente une facette de Jésus surprenante. Celui qui aime son père ou sa mére plus que moi n'est pas digne de moi; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n'est pas digne de moi… » L'unité à laquelle nous tenons tant semble être compromise. Dans la mesure où il est question de choisir entre Dieu et son père, sa mère, son fils, sa fille, nous sommes introduits à une forme de séparation, de division, voire de pertes. Jésus vient se placer au cœur de notre désir profond d'harmonie. Nous voulons vivre en communion avec Dieu et avec ceux qui nous ont permis de grandir, de nous construire. Or, ici, Jésus semble établir une héérarchie, » plus que moi ».
Une lecture trop rapide fait que nous pourrions imaginer un choix univoque. L’amour de Dieu exigerait de mettre de côté l’amour des parents, des enfants. Ces personnes qui nous ont permis d’être ce que nous sommes devraient alors être considérées comme la partie négligeable de notre rapport au monde. Les valeurs, la foi, qui nous ont été transmises par la famille, disparaîtraient au profit de l’amour de Dieu seul.
Jésus vient se placer au centre de ce qui nous a tissés et a fait les êtres que nous sommes. C’est ici que Matthieu laisse entendre la nécessité d’un dépassement. Si la transmission de « notre représentation » du monde vient prendre toute la place, en devenant un système érigé en absolu, qui permet de nous protéger de ce qui nous fait peur, nous dérange, et de nous mettre en évidence, nous nous trouvons à construire « notre » vérité. Celle-ci laisse peu d'espace à Dieu, puisqu’elle se veut sans référence au « Tout Autre ». Ce matin, nous sommes invités à une saine distance qui permet d’interroger les images reçues, les valeurs accueillies, pour laisser Dieu s’y glisser au cœur de notre propre mystère. Il s’agit d’y découvrir les traces de la présence de Dieu en nous. Ce « Dieu fait chair » en notre monde prend corps en nous. Pour l’accueillir, nous sommes invités à renoncer à ces acquis qui empêchent de nous situer comme personne adulte devant Dieu. Cet itinéraire conduit à l’accueil de l’autre et du « Tout Autre ». C’est à ce prix qu’il devient possible de « prendre sa croix » et suivre le Christ. Évidemment, la sécurité bienfaisante disparaît. Elle devient interrogation et quête de sens à l’intérieur de toute une vie. Ainsi, il n’est plus question de tout savoir, d’avoir réponse à tout. Au contraire, il s’agit de nous aventurer vers l’inconnu, celui qui nous habite, qui demande à être reconnu en raison de la venue du Fils de Dieu en notre humanité.
La « vérité » devient alors une promesse. Elle se laisse découvrir dans ces liens fondamentaux qui tissent notre être; ceux de père-fils, de mère-fille. Ces relations donneront lieu, par la suite, à une interrogation permanente : devant l’autre que nous côtoyons, celle et celui placé sur notre route, qui accueillons-nous?
Ce matin, par l’intermédiaire de Paul s’adressant aux Romains, la liturgie semble nous acheminer vers une réponse. « Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle. » La nouveauté demande de «renoncer… pour accueillir ». C’est en quelque sorte un chemin de « petite mort » pour que la vérité se maintienne au cœur de notre vie de foi.
Si nos projets de vacances comportent des rencontres familiales, des retrouvailles, ou des « pèlerinages » à nos lieux d’enfances, qu’ils soient des occasions d’accueillir l’autre avec ce qu’il nous révèle de la personne juste et prophétique. Deux dimensions auxquelles nos cœurs aspirent tant pour accueillir la vérité qui cherche à se construire tout au long de notre existence.