Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel?
Des gens de notre époque, par exemple des astronomes amateurs, savent bien que c’est stimulant de regarder vers le ciel. Ça permet de reconnaître et de découvrir des milliers de planètes. Des scientifiques passent aussi leur vie à scruter le ciel et l’espace pour coloniser la Lune ou Mars.
Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel?
Les apôtres, les gens d’alors avaient sans doute de bonnes raisons de regarder vers le ciel. Ils concevaient l’espace et le monde d’une autre manière, en-haut vers l’infini et ici-bas, sur du plat. Jésus est venu d’en haut ici-bas et il est retourné là-bas, en haut. Il est passé dans une autre dimension, ailleurs. Il est sorti de notre monde.
Pourquoi restons-nous là à regarder vers le ciel?
Nous aussi, nous regardons vers le ciel. Nous sommes parfois dans les nuages : à rêver, à contempler, à imaginer une autre situation que celle que nous vivons. Nous pouvons en être paralysés, sclérosés… à imaginer une autre Église que celle dans laquelle nous sommes, à rêver à l’Église d’avant ou à celle d’après (Vatican II). Peut-être faudrait-il regarder ailleurs, comme à l’Ascension!
Regardons à l’horizon, au loin!
- à toutes les nations
- à commencer par Jérusalem
- dans toute la Judée et la Samarie
- jusqu’aux extrémités de la terre.
Depuis 2000 ans, la présence mystérieuse, spirituelle, invisible de Jésus dans la vie mondiale s’est réalisée. C’est vrai, nous en sommes témoins. Quand nous voyageons de par le monde, en d’autres pays, nous pouvons presque partout entrer en contact d’autres communautés chrétiennes, d’autres coutumes et d’autres fruits de cette présence spirituelle qui a de l’histoire.
Même quand on a peu voyagé – comme c’est mon cas - on peut faire l’expérience de la dimension internationale de la foi. Dans mon temps de formation comme jeune dominicain, j’ai eu la chance d’étudier avec des confrères portugais, japonais, mexicains et croates. J’en ai été témoin, cela m’a fait découvrir d’autres manières de vivre, de croire et de penser.
Depuis une vingtaine d’années dans mon ministère, je suis présent aux prêtres et religieux en repos, en ressourcement. J’en ai côtoyé aussi beaucoup qui venaient de « l’étranger » : d’autres nord-américains, des haïtiens, des latinos (Argentine, Colombie, Nicaragua), des européens, des libanais et des syriens, des africains et même un confrère de l’Océanie.
En accueillant ces prêtres de partout, cela m’a ouvert des horizons, m‘a agrandi le cœur, m’a permis de découvrir et respecter d’autres manières d’être chrétiens responsables. J’en ai été un témoin choyé!
Mais j’ai aussi observé beaucoup de limites communes à tout le monde : mal s’aimer soi-même et par conséquent mal aimer son prochain, dommages intérieurs faits par des abus de générosité et d’engagements, abus de pouvoir, de conscience… et même des abus sexuels.
De partout monte le désir d’avoir une autre sorte de témoins.
À nouveau, l’Ascension nous invite à regarder ailleurs, cette fois-ci, en nous, en-dedans de nous.
Regarder en-dedans de nous!
Que se passe-t-il en nous, en dedans de nous? L’évangile de ce matin insiste sur deux points : la conversion et le pardon des péchés.
Il y a une phrase magnifique juste avant le début du découpage de l’évangile de ce matin, en saint Luc. « Jésus ouvrit l’intelligence de ses disciples aux Écritures ». Changer notre mentalité, nous convertir, modifier notre manière d’envisager les souffrances, mes souffrances et ma mort, implique aussi un effort de conversion. C’est souvent très difficile de changer nos idées sur notre vie, sur la vie des autres, notre manière de voir et de comprendre la vie des proches.
Nous faisons aussi partie d’une génération qui connaît bien les thérapies, ses démarches exigeantes. Si nous regardons en-dedans de nous, nous voyons les conséquences à nos « péchés », le besoin de pardonner et de nous pardonner : bien reconnaître nos plaies, nos cicatrices, les blessures reçues ou données à d’autres. Cela prend du temps de vouloir se changer. Il faut savoir attendre, et s’attendre. L’Ascension, c’est aussi cela : une aide intérieure à nos efforts personnels.
Après 40 jours de formation permanente intense, avec un excellent Maître, alors qu’ils portent encore des questions de fond, les apôtres sont invités à la patience. Jésus leur demande d’attendre encore, avant de partir… attendre qu’une promesse se réalise, celle du Père, attendre que la force venue d’en haut les porte de l’intérieur, les soulève, comme naturellement.
Nous aussi, ses disciples, nous sommes invités à attendre que ce soit mûr. En pastorale, cela ne nous arrive pas souvent que l’on suggère d’attendre. On parle plutôt de se dépêcher à s’engager. Même après toutes nos années de formation, nos belles années d’engagements multiples, nous les disciples nous sommes invités à attendre :
- pour que notre terre en dormance mûrisse et porte fruit
- pour que notre vie parle par elle-même et qu’elle soit portée par la joie, par la prière
- pour que nous devenions des témoins ajustés à notre temps, à nos milieux.
En ce temps de l’Ascension,
Bénissons-nous! Disons-nous et faisons-nous du bien en attendant la Pentecôte de nos vies!