CCSA






Communauté chrétienne St-Albert le Grand





Imprimer

Voir le déroulement de cette célébration

La Toussaint (C)

3 novembre 2019

« Vous êtes sur la bonne voie… »

Sagesse 11, 22-12.2      Matthieu 5, 1-12a

 

Alain Ferron

Hubert Doucet      

La Toussaint, la fête de la Toussaint peut être vue comme celle du souvenir. Du souvenir de ceux et celles qui nous précèdent et qui ont témoigné par leur vie de la présence et de l’action du Christ Ressuscité du Vivant en notre monde. C’est aussi cependant la fête de l’avenir, de l’espérance. La sainteté c’est en effet l’avenir proposé par Dieu à tous les hommes et les femmes, jeunes et vieux de tous les temps. Nous sommes tous appelés à devenir des saints, des saintes.       
           
Après avoir affirmé cela; la première chose que nous ne devons jamais oublier, c’est que Dieu seul est saint.   
           
Appelés à la sainteté, c.-à-d. à la plénitude de vie, nous avons besoin pour y répondre, pour vivre notre quotidien avec ses défis et parfois ses combats de témoins de vie et d’amour, d’hommes et de femmes qui sont source d’inspiration et nous permettent d’avancer et de progresser. Il y a bien sûr les grands témoins, les héros que l’Église en les canonisant nous présente en modèles. Il y a cependant bien des témoins, des saintes et des saints de l’humble quotidien qui nous soutiennent et nous inspirent sur la route. Humbles ou grands témoins d’Évangile; ce que Dieu a réalisé ou réalise encore pour et par chacun d’eux, il le veut aussi pour nous tous. Nous partageons avec ces témoins la même vocation.  Jésus nous montre le chemin. C’est celui des béatitudes – L’Évangile proclamé ce matin.         
           
Pour comprendre toute la portée des béatitudes, c’est vers le Christ que nous devons d’abord nous tourner. Il est, lui, le pauvre de cœur qui attend tout de Dieu. Il est le doux, celui qui relève et accueille. Il est le miséricordieux qui se penche vers les misères et cherche à les apaiser. Il est l’artisan de paix qui invite sans cesse à pardonner. Il est le persécuté qui va jusqu’au bout,  jusqu’à la croix.    
           
           
Les béatitudes évangéliques révèlent le cœur de Jésus lui-même et son option de vie (option pour son Père dans une relation filiale d’amour, option pour le Royaume – dynamisme de vie au cœur du monde comme le grain de sénevé, option préférentielle pour le plus petits). Elles nous montrent le chemin pour parvenir au vrai bonheur à la suite du Christ. Heureux et heureuse sommes-nous si nous prenons cette voie à sa suite. Dieu nous dit « Vous êtes sur la bonne voie… » La voie de la sainteté, c’est à dire de la plénitude de vie et d’amour. 
           
Il ne faut pas s’y méprendre. Il ne s’agit pas bien sûr de faire l’éloge de la souffrance, de la misère ou de la pauvreté. Tout au contraire — mais de reconnaître que nous ne sommes pas seuls sur la route et spécialement à l’heure des combats. Que nous marchons avec le Christ et que sa grâce nous soutient et nous donne d’avancer. Alors nous pouvons découvrir la force, l’amour nécessaire afin d’assumer le quotidien de notre existence. Heureux et heureuse sommes-nous dès aujourd’hui de vivre et de comprendre cela.        
           
Je suis allé lundi passé aux funérailles de mon évêque à Rouyn-Noranda. Mgr Dorylas Moreau est décédé à 72 ans de la SLA — sclérose latérale amyotrophique. Dans les derniers temps de la maladie, il avait perdu la capacité d’élocution et il ne communiquait que par l’écrit. Rendu au soin palliatif, l’un de ses amis a voulu lui demander comment on pouvait se sentir en fin de vie… J’aimerais vous livrer sa réflexion qui se situe très bien dans l’esprit des béatitudes :        
Comment se sent-on quand…?                  
            Il y a quelques jours, je recevais la visite de bons amis. À peine la conversation amorcée, l’un d’eux me demande : « Eh bien! Comment se sent-on quand…? » et il suspendit la fin de sa phrase. Il ne savait peut-être plus comment la formuler. Il me savait malade et faisait sans doute référence à la dégradation progressive de la vie qu’on m’avait annoncée. Au même instant, je n’ai pas su comment répondre de manière juste. Mais par la suite, seul, j’ai réfléchi. Comment me sentir quand la fin probable de ma vie m’est annoncée?      
           
            C’est un chemin cahoteux qu’il me faut marcher. Né et grandi sur les bords du grand fleuve dans le Bas-Saint-Laurent, je peux comparer mon état à un bateau battu par les vagues de la mer. Parfois les vagues sont immenses par grand vent et elles font craquer le bateau; d’autres fois, elles sont plus légères et ont l’effet d’une poussée qui fait avancer. Mon état s’apparente à cela.  
           
            À l’expérience, il est certain que l’on apprécie bien davantage le moment présent : un sourire, un signe de la main, une aide, un souvenir partagé, un pas familier, la beauté du soleil naissant, la bonne chaleur du jour, la légère brise de vent dans les arbres et sur les feuilles, le chant de l’oiseau, et tout bruissement dans la nature… Tout ce qui est normal dans une vie ordinaire prend un relief particulier en fin de vie.        
           
            Je suis conscient aussi de mener plus loin ma mission de baptisé et de prêtre, quoi qu’autrement. Le regretté P. Bruno Chenu, décédé d’un cancer, il y a quelques années, avait dit qu’être homme, c’est souvent se tenir dans la joie mais c’est aussi savoir se tenir dans l’épreuve « où nous ne pouvons que nous blottir au creux de Dieu ». Je rends grâce d’être croyant car ma foi, même mise à l’épreuve, continue de me soutenir comme une force indicible. Marek Halter a écrit : « C’est en des moments comme ceux-là que j’envie les hommes de foi ».
           
Pour chacun de nous, il y a de ces témoins qui, à leur façon et dans leur contexte de vie, nous inspirent et nous proposent la voie des béatitudes. Lors de notre diner-communautaire après la célébration nous aurons l’occasion de partager avec les résidents du Centre fédéral de formation sur cette question : Est-ce qu’il y a quelqu’un qui a été un témoin de vie dans mon existence et qui est source d’inspiration pour mon propre cheminement de vie ?           
J’inviterais maintenant Pascal à partager avec nous son expérience concernant ses témoins de vie :…   
           
Le chemin des béatitudes, de la sainteté est pour tous. Elle est la destinée pour l’humanité entière, non pas seulement pour les purs (s’ils existent) mais pour les pécheurs sauvés que nous sommes, les pécheurs que Dieu veut combler de sa sainteté à lui. « Ceux qui tombent, tu les reprends peu à peu, tu les avertis, tu leur rappelles en quoi ils pèchent, pour qu’ils se détournent du mal et croient en toi, Seigneur ».
Et j’ajouterais : vivent en toi Seigneur — blotties au creux de ton cœur…