CCSA






Communauté chrétienne St-Albert le Grand





Imprimer

Voir le déroulement de ce dimanche


3e Dimanche de Pâques 

Soyez mes témoins

Bruno Demers

Jn 21, 1-19

Les premiers dimanches du temps pascal nous présentent des récits d’apparition de Jésus. Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais je me suis toujours demandé pourquoi Jésus n’est-il pas reconnu tout de suite. Compte tenu des événements traumatiques que les disciples ont vécus, il me semble que la reconnaissance aurait dû se faire plus rapidement. L’évangile d’aujourd’hui fournit quelques pistes de réponse à notre question. Et ces pistes peuvent nous aider, nous aussi, à le reconnaître aujourd’hui.     
           
Si nous avions à inventer un corps de ressuscité, nous lui donnerions certains éléments. D’abord, nous insisterions sur la pleine corporéité de Jésus, ce qui permettrait de le reconnaître au premier coup d’œil. De plus, nous lui attribuerions des pouvoirs plus évidents qui montreraient bien qu’il appartient désormais à la sphère divine. C’est comme ça qu’on imagine d'un corps de ressuscité. Or, les récits d’apparition que nous trouvons dans les évangiles ne correspondent pas à nos attentes spontanées.        
           
C’est en regardant attentivement ce que vivent les disciples que nous pouvons commencer à comprendre. D’abord, après la mort de Jésus ils sont retournés en Galilée. Puisque le projet de Royaume de Dieu de Jésus n’a apparemment pas réussi, ils sont retournés en arrière, à ce qu’ils savaient déjà, laissant de côté leurs rêves de vie nouvelle. Ils retrouvent leur métier de pêcheurs. Dans notre récit, ils ont peiné toute la nuit et sont fatigués. Ils sont même découragés parce qu’ils n’ont rien pris.       
           
C’est à ce moment-là que Jésus leur apparaît. Il les rejoint après la nuit, dans leur peine, dans leur souci, dans leur faim. Et il les appelle : Les enfants, auriez-vous quelque chose à manger? Jusqu’à ce moment-là, ils avaient bien vu qu’un étranger se tenait sur le rivage mais les disciples ne savaient pas que c’était lui. À partir de l’instant où ils entendent sa voix, ils commencent à réagir : un sursaut provoqué par une parole et un consentement à ce que Jésus leur demande. Ils jetèrent donc le filet, et cette fois, ils n’arrivaient pas à le tirer.      

Il en va de même pour nous aujourd’hui. C’est souvent quand nous avons peiné toute la nuit, sans rien prendre, que Dieu est plus facile à percevoir. Il est plus difficile de l’écouter et de le voir quand nous sommes encore suffisamment forts pour tout gérer par nous-mêmes. Il est plus facile d’écouter l’appel de Jésus quand nous avons éprouvé par nous-mêmes notre incapacité, notre faiblesse, notre stérilité. Nous sommes alors plus réceptifs à sa Parole.     
           
De façon étonnante, Jésus ressuscité devient plus concret quand on n’a rien pris, quand on est fatigué, quand on est affamé. Autrement dit, c’est quand l’évidence de notre faiblesse est manifeste qu’il est plus facile de faire l’expérience du ressuscité et de le reconnaître dans nos vies.   
           
Et ça ne s’arrête pas là. Il y a un feu sur la grève avec du poisson et du pain. Les disciples reviennent vers Jésus avec leurs filets chargés de poissons. Mais Jésus n’a pas besoin de leurs poissons. Il a déjà préparé le repas et, en plus, il les attend pour manger avec eux.         
           
Dans le récit, on est maintenant en plein contexte d’eucharistie. Jésus est le pain de vie. Il est celui qui se donne en nourriture. Il est le grain de blé mort, qui meurt pour porter du fruit en abondance pour la multitude.        
           
Apparaître sans que les disciples ne s’y attendent, les appeler, être à table avec eux, ce sont là les trois manifestations du Ressuscité par lesquelles il se révèle à eux comme le Vivant. 
           
Notre récit présente ensuite un dialogue entre Jésus et Pierre sur l’amour et la responsabilité pastorale. En écho à la triple trahison de Pierre lors de la passion, Jésus lui demande à trois reprises : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu vraiment? La trahison de Pierre est reprise et pardonnée. Désormais, ce sera par l’amour que s’exercera le ministère dans l’Église : Sois le berger de mes brebis. Car, nous en avons déjà fait l’expérience, ce qui est matériel diminue à mesure qu’on le partage. Au contraire, l’amour croît d’autant plus qu’il se donne davantage.     
           
Suis-moi, Pierre. Vous aussi, soyez mes témoins.