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Communauté chrétienne St-Albert le Grand





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La Pentecôte 

Changement climatique

Raymond Latour

Ac 2, 1-11       1Co 12,3b-7.12-13  ouRm 8,8-17  Jn 20, 19-23  ou Jn 14, 15-16.23b-26    


  Les récents incendies de forêts dans l’Ouest canadien, les températures anormalement basses que nous avons connues ce printemps, et ces phénomènes météorologiques qui, par leur intensité, leur durée ou leur fréquence, s’écartent des normales saisonnières ne sont pas tous à attribuer aux changements climatiques, mais leur influence reste indéniable. Sécheresse, incendies, tornades, typhons, canicules, et autres événements climatiques extrêmes auraient de quoi secouer jusqu’au plus endurci des climato-sceptiques !        
      Les Actes des Apôtres rapportent la venue de l’Esprit dans des termes qui se rapprochent de ces phénomènes météo : « un violent coup de vent », annonciateur toutefois d’une nouveauté radicale, une transformation, un vent de renouveau. Il reste difficile de pointer du doigt ce qui relève de l’intervention de l’Esprit.     
À la Pentecôte, l’Esprit Saint a fait irruption ! « Qui en douterait », semble dire l’auteur du livre des Actes des Apôtres qui mentionne une série d’événements au caractère mystérieux. Un nouveau climat règne maintenant dans le groupe des Apôtres. L’Esprit les a sortis de leur retranchement. Balayées les peurs qui immobilisent, les voilà propulsés vers des gens d’autres langues et d’autres cultures, bien solides en terrain étranger !  
Les Apôtres ont d’abord fait l’expérience de cette force venue d’en-haut, à l’intérieur même de leur communauté. Les langues de feu qui leur donnaient de s’exprimer en d’autres langues, selon le don de l’Esprit, attestaient d’une capacité qu’ils ne pouvaient s’attribuer. Cette manifestation débordera bien vite le cadre du groupe des Apôtres pour atteindre tout Jérusalem. 
Cette fois, c’est une voix qui retentissait, une voix non identifiée qui provoque un rassemblement de gens de toutes provenances. Ils sont curieux, intrigués. Puis, dans ce récit, la voix unique fait place à celle des Apôtres que chacun entendait dans son propre dialecte. Là, tout le monde était « en pleine confusion ». Voilà en effet qui était assez inattendu de la part de galiléens. À ces gens de multiples cultures les Apôtres arrivent à communiquer « les merveilles de Dieu », ce qui n’a pas manqué de provoquer stupéfaction et émerveillement.       
      Le groupe des Apôtres mis à part, personne n’est trop en mesure d’identifier encore l’œuvre de l’Esprit. Mais pour tous ce jour-là, il se passe quelque chose à Jérusalem, c’est indéniable. De l’inédit. Ce que l’oreille n’avait jamais entendu, ce que les yeux n’avaient jamais vu, la foule multiculturelle de Jérusalem en était témoin.              
      Le groupe des Douze avait la capacité de bien interpréter cet événement insolite. Jésus leur avait parlé d’une force qui viendrait sur eux. Il leur avait confié que ses paroles n’étaient pas de lui mais provenaient du Père. Les propos de Jésus ont dû leur paraître bien mystérieux jusqu’au moment où ils ont expérimenté pour eux-mêmes la présence d’une Parole reçue, produite par l’Esprit et transmise au-delà de leurs limites humaines. Une communication qui les dépasse !
      Le feu sacré de l’Esprit ne sera toutefois pas l’apanage des seuls apôtres. Le meilleur reste à venir. Bientôt, l’Esprit se communiquera depuis Jérusalem jusqu’aux confins du monde, sans discrimination aucune. Avec l’événement de la Pentecôte, l’Alliance de Dieu atteint son sommet. Dieu s’est acquis un peuple de toutes les nations de la terre !   
       Dans cet épisode, le registre religieux est effacé au profit de la présence des peuples. La diversité est une des composantes de la Pentecôte. Ce jour-là, à Jérusalem, cette diversité se trouvait de passage, en visite. La Pentecôte l’a installée pour de bon. La mobilité qui caractérise notre époque aurait de quoi nous en persuader.       
Le vivre-ensemble nous fait découvrir de nouveaux interlocuteurs : les « autres » sont parmi nous, au point où il devient difficile de faire des distinctions. À croire que sous la poussée de l’Esprit, le « nous » s’élargit aux dimensions du monde. Un jour, il n’y aura plus d’étrangers.    
À la Pentecôte, d’autres, parfaitement autres, se sont sentis concernés par le message. Le mouvement est allé en s’accentuant. Il y a toujours à s’ajuster puisque notre humanité est constamment pétrie de ces rencontres, des changements qui lui viennent de tous les déplacements intérieurs et extérieurs, de ces frottements entre aspirations divergentes. Ici et là, émergence de nouveautés scientifiques, technologiques; développement de ressources ; conscience plus aigüe de certains problèmes; recherches de solutions à des enjeux sociaux : les changements opérés par l’Esprit sont à repérer au cœur de nos sociétés.          
Le vent de l’Esprit peut être perçu ici comme bénéfique, ailleurs, perturbateur; un jour provocant, un jour pacificateur. Il lui arrive de bousculer, mais le plus souvent, il s’insinue, discrètement. Son influence nous échappe, mais elle est là, dans nos petits dépassements, dans la création de dialogues, dans des désirs d’innovations, dans une recherche de consensus, dans une patience envers ce qui est encore en croissance, dans une tolérance envers ce qui nous déstabilise, dans un effort à produire, dans un geste ou une parole d’appui, l’Esprit qui, en douce, change le climat de nos cœurs et de de nos sociétés et s’invite aussi dans nos cheminements en Église.             
      L’Esprit souffle où il veut, de façon parfois capricieuse, inattendue, déroutante. L’Esprit a encore du souffle ! C’est lui qui nous renouvelle et nous fait vivre.