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Communauté chrétienne
Saint-Albert-Le-Grand de Montréal |
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Dimanche des rameaux (Année B)
5 avril 2009
Guy Lapointe et Dennis Tesson
Philippiens 2, 6-11
Introduction (Guy Lapointe)
Malgré les apparences, nous croyons au printemps. C’est surtout
le dimanche des rameaux. Aujourd’hui, les enfants restent avec nous
pour fêter. Ils agitent déjà leurs branches de cèdre.
Un climat de fête. Nous faisons assemblée pour célébrer
l’entrée dans la semaine sainte.
La période, disons-le, de crise que nous traversons, tant dans la société que
dans l’Église, une institution en pleine interrogation sur elle-même, donne,
je crois, à la célébration de la semaine sainte une
couleur bien particulière. Nous avons besoin de nous retrouver pour
nous souvenir et célébrer ce qui est au cœur
de notre foi : Jésus qui va au bout de sa vie pour nous, pour
que notre monde ait un avenir ouvert… Retourner en quelque sorte sur
le site de notre expérience de foi là où Jésus
nous a manifesté, pour reprendre une formule abondamment utilisée, qu’un
autre monde est possible. Oui, Grâce à lui, un autre monde est
possible…
Aujourd’hui, alors que nous savons que sa mort est si proche, nous
célébrons l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem.
Comme les habitants de Jérusalem, dans une sorte d’exagération
commune, avec et comme des enfants, nous crions notre joie, nos espoirs en
cet homme.
Plus que jamais nous devons rendre compte de l’espérance
qui nous habite. Une espérance qui n’a de cesse de travailler
l’histoire depuis ces jours et ce matin de Pâques où surgissant
de la mort, Jésus a renversé du même geste la suffisance
des bien-pensants. Mais c’est une espérance confiée à nos
mains fragiles, à nos consciences vulnérables, à nos
gestes souvent maladroits. Plus que jamais nous avons besoin d’ouvrir
notre vie à la lumière pascale.
Cette entrée de Jésus à Jérusalem n’est
pas qu’une histoire du « passé » Elle
est présente; c’est celle de l’entrée de Dieu dans
notre vie. Pendant quelques minutes dans cette église, on reprend
le cri de joie de la foule de jadis : « Hosanna! » « Donne-nous
ton salut ». Jésus monte sur le dos d’un âne. Étrange… et
l’évangéliste Marc y accorde de l’importance… On
le rencontre cet âne chez le prophète Zacharie. On le
connaissait depuis trois siècles. Jésus n’entre pas sur
un char de guerre, mais sur le dos d’un animal humble. On comprend
que l’évangéliste Marc mette curieusement en vedette
la recherche de l’âne. Un âne qui n’a jamais servi
et qui n’a encore porté personne…
Après avoir applaudi avec enthousiasme notre délivrance,
nous nous interrogerons sur les suites pour nous… C’est la semaine
sainte.
Enfants, adultes, nous écouterons bien cette histoire, qu’on
proclamera avec ampleur.
Oui, posons- nous encore cette éternelle question, mais cette
fois en la chantant : « Qui donc es-tu Seigneur Jésus? ».
Homélie (Denis Tesson)
Ce texte célèbre de Paul aux Philippiens a été longtemps
le credo des églises primitives.
— Il affirme la divinité de Jésus, en des termes
que notre credo actuel précisera : « né du Père
avant tous les siècles, de même nature que le Père, descendu
puis remonté aux cieux ».
— Il se termine par l’acclamation : « Jésus
est Seigneur, à la gloire du Père» qui était déjà celle
des disciples lors de l’entrée à Jérusalem.
De cette procession des Rameaux, l’iconographie chrétienne
fera un grand thème qui suscitera des centaines d’œuvres
d’art : Monté sur un âne, Jésus, pourvu d’une
grande auréole dorée, regarde avec douceur le peuple à genoux
et les disciples en liesse.
Se laisser proclamer comme le Messie : son ultime provocation, pour
laquelle il serait sans doute supplicié à mort. Il a l’âge
de notre fils. Il veut vivre.
Mais serait-ce encore vivre s’il fallait renier ses convictions et
trahir la confiance de ses amis… Il est grand l’être humain
dans ces décisions-là.
Jésus pensait aussi à ce qu’il adviendrait de sa mission
et de ses disciples. Il est grand l’homme qui, sentant la mort l’étreindre,
veut rassurer ses proches et leur promet de ne pas les abandonner, quand
il les persuade que la vie continue et qu’il a confiance en eux. Il
est grand l’humain qui, dans ce dernier service à ses amis,
se sent soudain plus léger, capable d’affronter la mort et de
croire à la vie.
Donner pour mieux se libérer, s’abaisser pour mieux s’alléger,
s’abandonner pour renaître. Voilà le message, voilà l’ultime
témoignage d’une vie accomplie…
Comme le disait Paul, une telle Foi est folie pour les sages.
S’abandonner aux autres, ce n’est pas laisser tomber, c’est
passer le relais : C’est témoigner, préparer,
enseigner, convaincre, soutenir et agir.
Voici l’homme qui s’est élevé jusqu’à Dieu,
celui qui nous a montré le chemin, voici l’homme qui est le
chemin vers Dieu.
Voici, écrasé par son auréole, l’homme qui porte
sur ses épaules tous les péchés du monde.
Mais voici aussi, parmi la foule de Jérusalem, le disciple occasionnel
qui se dépouille de son manteau, se fait serviteur, est à genoux
et s’émerveille, voilà l’homme plein d’espérance
mais aussi plein d’inconstance et d’ambiguïtés.
Voici l’humain tenté de s’élever
vers Dieu.
Voici aujourd’hui Jésus dont nous rappelons la mémoire,
dont nous perpétuons l’action, la parole et l’être,
celui que nous ne laissons pas mourir.
Voici celui qui est toujours vivant parce que sa vie est entre nos mains.
Et nous voici, rassemblés dans cette manifestation renouvelée
chaque dimanche, qui voudrions surmonter nos peurs et nous élever
vers Dieu par le chemin montré en Jésus.
Croire en l’homme. Comme le disait Paul, une telle
Foi est scandale pour les croyants.
Depuis 20 siècles et depuis l’apôtre Paul, nos Communautés
chrétiennes ont eu l’audace de réinterpréter l’enseignement
de Jésus en prenant en compte l’évolution de nos cultures
et de notre compréhension du monde.
Dans notre civilisation qui doute de la toute-puissance de
Dieu, qui doute de la vie après la mort, mais qui veut croire que l’évolution
qui nous a fait passer de primate à humain continue de pétrir
l’humanité, nous n’aimons pas l’idée d’un
Dieu qui s’abaisse jusqu’à nous. Nous préférons
croire à l’homme debout qui aspire à Dieu.
Nous, qui ne pouvons nous élever qu’un petit peu à la
fois, par des petites résurrections tout au long de notre combat pour
la vie, nous reconnaissons en Jésus le chemin, le précurseur.
En essayant de marcher à sa suite, c’est quelquefois deux pas
de reculons pour un pas en avant mais nous avons besoin de croire que chacun
de ses gestes est répétable par chacun de nous : que
ce sont des actions humaines et faisables et que nous sommes, nous aussi,
de condition divine.
Ce Dieu créateur et tout puissant, le Dieu orgueilleux et jaloux
d’Abraham contemple, comment notre humanité fait évoluer
l’Alliance qu’il leur avait proposée. J’espère
qu’il dit encore : c’est très bon et ça va
dans le bon sens. Je crois qu’il continue de se reposer… sur
nous pour la suite du Monde.
Ce Dieu révélé par Jésus, le Dieu Père
qui est aux cieux regarde ceux qui se font un Dieu à leur image et
se représentent Jésus sans auréole. Cela est juste et
bon, se dit-il, si ça les rend capables de voir leurs frères
lumineux et transfigurés, si ça les aide à se voir eux-mêmes
habités par l’Esprit et en continuelle résurrection.
Cet Homme-Dieu, si proche et si vulnérable, qui nous fait confiance,
dans les pas de qui il est possible et il est bon de marcher, gardons lui
compagnie et fidélité dans cette célébration
qui s’étire jusqu’à Pâques.
Gloire au Sauveur venu de la terre! — Gloire à Jésus
qui nous fait renaître! — Gloire à nous qui sommes sa
présence au monde!
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