L’Évangile de ce midi appelle les enfants au milieu de
nous. Que l’on parle d’enfant! Plusieurs se souviennent aussitôt
du Petit Prince écrit durant la dernière grande guerre
-1943-. Des mots tout simples à faire rêver même les
adultes : « L’essentiel est invisible pour les
yeux… C’est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait
ta rose si importante. »
Et alors? Qu’en est-il de l’essentiel dans nos vies aujourd’hui?
Dans nos vies quotidiennes au jour le jour? Dans ma vie personnelle,
sociale, voire familiale? Ai-je encore le temps de considérer
les enfants à la manière
de Jésus? Et pourquoi? Et comment? Au moment où Jésus
de retour à la maison est quelque peu scandalisé des ambitions
des disciples adultes qui se disputent à propos d’un certain
royaume et à propos de la première place, il leur amène
un enfant, le place au milieu, l’embrasse et leur parle de politesse
et d’accueil jusqu’à leur laisser entendre que l’accueillir
lui, Jésus c’est aussi accueillir le Père.
Eh oui! Jésus aime les enfants. Il le dit souvent : « Laissez-les
venir à moi, ne les empêchez pas… qui donne à boire
un seul verre d’eau, même un seul verre d’eau fraîche à l’un
de ces petits en mon nom recevra sa récompense… Qui accueille
un enfant en mon nom… m’accueille moi-même… » (cf.
Luc 18, 15; Mc 9,37; Mc9,41)
Le même Jésus en personne va jusqu’à nous
souhaiter de re-devenir enfant pour entrer dans le royaume. Il y a de
quoi inquiéter les plus âgés d’entre nous!
On se demande comment à un certain âge l’on puisse
redevenir enfant sans tomber en enfance? La question a été posée à Jésus
par un certain Nicodème et Jésus a pris la peine de lui
répondre : « À moins de naître d’en
haut, nul ne peut voir le royaume de Dieu…v» (cf. Jn 3,2)
Il s’agit de naître de l’Esprit. Et cela veut dire
concrètement? Écouter la Parole, faire naître la
Parole en nous, enfanter l’évangile… Aimer la lumière,
aimer l’amour, le pratiquer, pratiquer le don de soi… À la
manière de Jésus qui va jusqu’au bout de son expérience
de fils de la lumière, du don de soi, à nous…. « Ma
vie je la donne et je la donne de moi-même. » (cf. Jn
10,15)
Voici le temps de nous rappeler ici en assemblée, et tout de
suite, le privilège hautement spirituel reçu à notre
baptême. Le baptême par gratuité divine nous fait
ni plus ni moins enfant de Dieu, apte à une renaissance selon
l’Esprit. Au baptême notre Dieu s’est officiellement
et publiquement nommé Père (au sens biblique). Et cela
avec tout ce que ce mot mystérieux nous offre de grâces
d’enfants… et d’amour. Peut-être faudrait-il
nous demander, en passant, à cause d’une certaine éducation
reçue, jusqu’à quel degré dans nos rapports
privilégiés avec Dieu, Celui-ci ne demeure-t-il pas encore
et souvent que le Tout Puissant, l’Éternel, plus lointain
que présent, jusqu’à mettre en premier la politique,
le pouvoir, l’argent, le succès, l’approbation des
autres? Il n’y aura guère pour nous de place et de temps,
de penser à Dieu en termes affectifs de compassion?...
Comprenons que Jésus devant les ambiguïtés des siens
et les ambitions de certains à savoir qui est le plus grand, ait
décidé d’appeler un enfant au milieu. Dans sa perspective,
la seule hiérarchie possible est que le plus grand parmi nous
soit celui, soit celle qui aime davantage. C’est dans le don de
soi, le service, la compassion, que se trouvent l’invisible et
l’essentiel de nos vies… si difficiles à équilibrer.
Peut-être est-ce bon en terminant de constater qu’en cette
communauté St-Albert-le-Grand, l’accueil et la catéchèse
des enfants a pris qualitativement et quantitativement une grande importance.
Justement dans un instant, ils viendront les enfants. Un peu comme une
parabole vivante de l’évangile : ils arriveront comme
ils sont, vivants, turbulents, mais sans pouvoir autre…. C’est
avec eux que nous poursuivons cette célébration des pouvoirs
invisibles de l’amour qui lui ne connaît pas nos calculs
et distinctions…. « Laissez-les venir »,
nous dit Jésus. « Qui accueille un enfant en mon nom,
c’est moi qu’il accueille. »
En attendant que vienne la musique.