« Écoutons cette nuit qui n’est pas un conte ». « Le
peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grand lumière ». « Aujourd’hui
vous est né un Sauveur… » Des paroles qu’on
a si souvent entendues.
Qu’on le veuille ou non, à chaque année, avec ses chants,
les souhaits qu’on se transmet, les cadeaux qu’on se donne, les réconciliations
réussies ou ratées, nos excès, la fête de Noël
nous traverse la peau et nous rejoint au fond de nous-mêmes. Noël
est une fête qui semble appartenir à tout le monde. Plusieurs cherchent à vivre
quelques instants de bonheur dans leur vie. La fête de Noël, n’est-elle
pas une fête à plusieurs visages. Quel est le visage de Noël
que nous voulons célébrer?
Ce que j’entends dans les passages lus, dans les chants et la musique de
notre célébration, c’est l’espérance dont on
a tant besoin par les temps qui courent. Ce que j’entends surtout dans
le récit si bellement raconté de la naissance de Jésus,
c’est un Dieu attendu depuis des siècles, dans les ténèbres
comme dans la lumière, et qui se manifeste dans notre humanité,
dans ce qu’il y a de plus mystérieux en même temps qu’ordinaire,
de plus beau et de plus simple : une naissance. Sur le chemin de Bethléem,
un couple marche pour aller au recensement décrété par les
Romains. Il cherche un abri, mais il n‘y a pas de place… En pleine
nuit, sous le ciel de Bethléem, Joseph et Marie connaîtront pourtant
la joie d’avoir un fils, Jésus. Ce n’est certainement pas
de ce côté que depuis des siècles on attendait le Messie.
Mais, c’est de cette façon que Dieu se présente à nous.
La nouvelle que nous n’aurons jamais fini d’accueillir.
Ce que j’entends de vous qui êtes ici, qui avez trouvé important
de participer à cette eucharistie, c’est que la mémoire de
la naissance de cet enfant est toujours présente. Cette nuit n’est
pas que la célébration d’un beau souvenir de la Nativité,
c’est la naissance d’un monde nouveau toujours à faire, et
il nous appartient, là où nous sommes, de réaliser cette
naissance. C’est ainsi que Dieu se présente à nous. Si nous
avons de la difficulté à y trouver son visage, c’est peut-être
parce que nous le cherchons partout, sauf là où il se trouve, comme
dans cette naissance plutôt sans histoire, alors qu’elle est devenue
une grande histoire de Dieu dans notre monde. Cherchons cette naissance du côté de
celles et ceux qui sont sans parole, tout autant que du côté des
personnes et des groupes qui, cette nuit, vont célébrer avec peu
de moyens, avec ce qui leur reste d’espoirs et d’espérance.
Car à Noël, de mille et une façons, tout le monde sent les
odeurs de la fête, même chez les personnes qui n’ont pas le
cœur à fêter. Comme pour se faire redire que tout est encore
possible. N’est-ce pas cela la naissance et la naissance de Dieu chez-nous?
Oui, la naissance d’un enfant nous redit que le présent se bâtit
sur l’avenir. Oui l’avenir du monde, notre avenir, est
ouvert.
Nuit de Noël! Dieu a épousé notre fragilité humaine.
On n’a jamais vu Dieu si proche de nous. Le Très -Haut
est devenu le Très -Bas (Christian Bobin). C’est l’arrivée
de la lumière dans la vie de nos hivers intérieurs. À Noël,
Dieu s’invite chez-nous et il nous propose un chemin de vie. Écouter
le récit de la naissance de Jésus comme on écoute
un poème
pour faire place à l’inattendu de Dieu pour redécouvrir
Noël
comme un cadeau… C’est toujours la même histoire,
et ce n’est
jamais la même histoire.
Jésus est né pour jeter des passerelles, pour rapprocher les humains
entre eux. Noël ne détourne pas du quotidien. Noël n’éloigne
pas du monde, de ses douleurs et de ses joies. C’est peut-être pour
cela qu’on se donne tant de cadeaux à Noël, comme pour nous
rapprocher, oser se dire qu’on s’aime.
Un nouveau monde va venir au monde. C’est en nous qu’il prend forme.
Il sera fait de notre chair, de notre sang, il ne sera pas un étranger
venu d’où on ne sait où. Il sortira de nous, il naît
comme nous. Un nouveau monde va venir au monde.
Qu’est-ce que j’entends de nouveau à chaque année?
Ce que j’entends de nouveau, c’est que cet événement
de la naissance de Jésus nous rappelle que c’est à nous maintenant
de naître et de faire advenir cette renaissance du monde là où nous
vivons, là où nous travaillons… Sommes-nous prêts à regarder
la vie bien en face? C’est une fête de la joie, de lumière.
Une promesse qui est tenue.
À Noël, lâchons prise et laissons un temps pour que l’imprévue
de Noël nous illumine. Noël, n’est-ce pas désirer mettre
au cœur de nos vies, le partage, la générosité, l’ouverture?
Noël, n’est-ce pas porter sur le monde, malgré tout ce qui
arrive, un regard de confiance plutôt qu’un regard angoissé?
Noël, n’est-ce pas continuer à chercher la lumière,
les signes porteurs d’espoir, de confiance en la vie? Oui, j’ose
espérer que nous sommes ici, cette nuit, pour nous rappeler ce Dieu à visage
humain, pour nous interroger sur nos façons de vivre. Noël, c’est
réveiller ce goût d’être ensemble pour partager pain
et vin en mémoire de Lui. Joyeux Noël à vous les bien-portants,
les blessés, les inquiets, les veilleurs, les cœurs amoureux. Un
tout-petit vient nous visiter. On l’appelle Sauveur, Merveilleux Conseiller,
Prince de la paix… Oui, Joyeux Noël à tous et à toutes!