La Nuit de Pâques (B)
7 avril 2012
Pourquoi veillons-nous ensemble?
Guy Lapointe
«Il y eut un soir et il y eut un matin, premier jour », avons-nous entendu. Mais pourquoi cette nuit est-elle si différente de toutes les autres? Pourquoi veillons-nous ensemble? Parce que toute nuit ouvre sur un matin; parce que ce matin-là le soleil s’est levé, comme nous le suggère cette magnifique toile. Chaque célébration de Pâques est un nouveau jour. C’est de grand matin que des femmes, qui ont un lien secret avec la vie, celles qui portent la vie, se sont rendues au tombeau, pour découvrir qu’il était ouvert et vide; pour y découvrir de nouveau l’aurore de la vie, la victoire de la vie sur la mort. N’est-ce pas — pour employer un mot étrange — une expérience « mystique » que vivent ces femmes, une expérience de foi profonde? Elles prennent conscience que tout ce que cet homme a vécu, cela ne peut pas mourir.
Et nous, pourquoi veillons-nous? Parce que Jésus, après avoir vécu le désert de la solitude et marché sur les routes de Galilée jusqu’à en mourir, s’est levé en cette nuit et que sa lumière nous a tirés des ténèbres. Pourquoi veillons-nous? Parce que la nuit du tombeau ne nous enfermera plus, si seulement nous restons éveillés, si la résurrection nous atteints dans notre quotidien, pour mieux voir les situations et inspirer les gestes à poser pour que la vie ait du sens. Ce « grand matin » de la résurrection nous redit : acharnez-vous à ne jamais laisser mourir la vie! Faites confiance en la vie, faites confiance en la vie de Jésus et vivez sur ses chemins. Il est allé au bout de son humanité. C’est tout son parcours humain qui ressuscite, qui prend une autre dimension.
Au cœur de cette expérience de la nuit de Pâques, l’aventure commence ou re-recommence. À la lumière de la résurrection et de cette célébration, je tente de retrouver les traces ou s’annonce l’expression de ma propre foi.
La Parole de Jésus est ressuscitée, donnée comme fondatrice et ne se suffit pas à elle-même. Il n’y a pour nous de résurrection du Christ — et c’est là ma conviction — que dans l’invention permanente des Béatitudes. Il nous faut inventer l’existence, inventer la vie, inventer l’amour. C’est toute l’humanité qui est présente avec ses désirs, ses goûts de vie et de résurrection parfois si mal traités, mais qui n’en continue pas moins.
Cela, je crois qu’on peut le saisir. Qu’on pense à ces jeunes qui vivent, à leur façon, cette réalité, en créant des liens entre eux, comme ils le manifestent présentement dans nos villes, pour penser un autre type de société; ils peuvent, sans toujours le soupçonner, rejoindre le récit de la résurrection.
Lorsque des femmes et des hommes ont assez de folie pour rêver qu’il y ait plus d’humanité, moins de pauvreté, plus de respect des autres et de la planète, la résurrection de Jésus est présente, Pâques a du sens…
Tant qu’il y aura des cœurs assez humains, jeunes et vieux, pour pardonner toutes les inconsciences, pour vaincre les haines et dire que les guerres et les attentats de toutes sortes ne donnent rien, mais ne font que briser les esprits et les espoirs de l’humanité, la résurrection de Jésus restera dans les mémoires.
Tant qu’il y aura des esprits plus préoccupés de servir et de faire grandir les autres, la résurrection restera dans les mémoires.
Tant qu’il y aura des regards tournés vers l’avenir et non un regard nostalgique sur le seul passé, la résurrection est présente. Pâques a du sens…
Oui, cette nuit de Pâques est une invitation à sortir de nos tombeaux, à vivre sur les routes, comme Jésus l’a fait. C’est là que nous retrouverons cet esprit de Jésus, esprit de résurrection, esprit d’ouverture. Sortir du tombeau, les femmes l’avaient bien compris. C’est dans ce monde de l’amour que le tombeau de Jésus s’ouvre au matin de Pâques.
Pourquoi cette nuit est-elle si différente de toutes les autres? Pourquoi veillons-nous ensemble? Parce que le Christ, pendant toute sa vie a voulu ressusciter les personnes arrêtées sur la route et qui se croyaient mortes. Parce que Jésus s’est levé en cette nuit. Et pour nous qui célébrons, c’est comme si nous étions, cette nuit, devant une nouvelle page blanche qu’il nous reste encore à écrire. La foi n’est pas conclusive, elle est inaugurale. La résurrection reste un récit ouvert.
Le Christ est vivant. Oui, il est vraiment ressuscité! Et nous?