34e Dimanche du Temps Ordinaire (B)
25 novembre 2012
Le Christ, roi de l'Univers
Une de mes étudiantes, qui était au Manitoba cet été, a été très impressionnée par l’accueil que les gens ont manifesté à la reine d’Angleterre quand elle est passée chez eux. Ils étaient très enthousiastes et expressifs!
Ce genre de réaction nous surprend toujours, nous qui vivons plus à l’Est. Ce n’est pas ce qui nous viendrait spontanément à l’esprit! Nous ne sommes pas à l’aise avec cette institution de la royauté, synonyme pour nous d’oppression et d’injustice. À tel point que, s’ils l’avaient pu, certains d’entre-nous auraient rejeté la fête qui nous est proposée aujourd’hui. N’est-ce pas anachronique? Pourquoi célébrer une fête de royauté, aujourd’hui, en 2012? Deux raisons me semblent justifier le fait de nous mettre à l’écoute du témoignage des premiers chrétiens et d’entrer dans la célébration qui nous est proposée. Tout d’abord, parce que Jésus ne cesse de parler d’un Royaume ou d’un Règne, celui-là même de Dieu.
Quand on ouvre les évangiles, c’est une des premières choses qui saute aux yeux : Le Règne de Dieu est comparable à… Il en va du Royaume comme… Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et le reste vous sera donné par surcroît. Que ton Règne vienne, une des phrases du Notre Père. Et Jésus ne fait pas qu’en parler. Il le fait advenir par ses guérisons, par ses exorcismes, par ses dénonciations des injustices.
C’est quoi au juste que ce Royaume? Ce n’est pas un lieu, un espace où il pourrait se déployer. Le Règne de Dieu ne vient pas comme un fait observable. On ne dira pas : « Le voici » ou « le voilà ». Comme nous le rappelle l’évangéliste Luc : Le Règne de Dieu est parmi vous! Cette expression désigne essentiellement une action : la présence agissante de Dieu fait irruption dans le monde. Et cette expression entend viser des personnes : Dieu agit en faveur de son peuple et ceux qui le reconnaissent l’accueillent par leur action.
Le Règne de Dieu est au milieu de vous. Toute la vie de Jésus est orientée vers la venue du Royaume. Deuxième raison pour célébrer la fête du Christ Roi : Le rôle de Jésus dans l’avènement du Royaume de Dieu. Dans l’évangile d’aujourd’hui, on nous dit : Ma royauté ne vient pas de ce monde… Si le Royaume de Dieu n’est pas comme les royaumes humains c’est aussi parce que les leaders de ce Royaume sont différent des rois oppresseurs ou tyranniques dont l’histoire nous a laissé tellement d’illustrations.
La figure emblématique de la royauté dans la Bible c’est le grand roi David, le roi selon le cœur de Dieu. Il y a bien eu l’épisode d’Ourias et de sa femme, mais c’est surtout parce que David était berger. Il savait ce que veut dire prendre soin d’un troupeau, c’est-à-dire s’occuper des petits et des faibles et s’assurer que tout le monde rentre au bercail. Les premiers chrétiens nous disent que le Père a ressuscité Jésus, qu’il en a fait le véritable roi, pasteur de l’humanité. Et cela, parce que Jésus a été fidèle à sa mission jusqu’au bout.
S’il règne, c’est en tant que serviteur en priorité des petits et des faibles. Si Jésus Christ est roi, c’est parce que son humanité s’est littéralement laissée posséder par la puissance de l’amour du Père. Nous qui voulons marcher dans les pas de Jésus, la seule puissance à laquelle il nous est demandé de nous soumettre est celle de l’amour. C’est toi qui dis que je suis roi. Je suis né. Je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Dans la suite du récit, Pilate demande à Jésus : « Qu’est-ce que la vérité? » mais il n’attend pas de réponse. Comme plusieurs de nos contemporains, aujourd’hui, pour lesquels il n’y a pas de vérité absolue. Ce n’est pas ce genre de vérité dont parle Jésus. Il n’est pas le défenseur d’une idéologie. Il est l’envoyé de quelqu’un. L’évangéliste Jean parle de Jésus comme Celui qui fait la vérité : la vérité d’une personne, de son authenticité. En effet, ce que Jésus pense, ce qu’il croit, il en vit. Il fait ce qu’il dit et ce qu’il dit vient de son être le plus profond. Jésus fait la vérité.
En ce dimanche, nous sommes invités nous aussi à faire la vérité, à surmonter les forces du mal en nous en gardant le regard fixé sur Jésus Christ, vainqueur de toutes les fatalités. Le Royaume de Dieu commence à l’intérieur de nous quand nous nous libérons des complicités avec le mal. Ce faisant, nos rapports avec les autres sont changés. Et l’avènement du Royaume de paix et de justice grandit davantage en notre monde. En ce dernier dimanche du cycle liturgique où nous anticipons le plein accomplissement de l’idéal chrétien, le Royaume de Dieu,nous sommes invités à marcher dans les pas de celui qui le fait advenir avec nous.