5e Dimanche du Carême (A)
6 avril 2014
« Je vais ouvrir vos tombeaux… et vous vivrez »
Hubert Doucet
J’aime ce texte d’Ézékiel qui a servi d’ouverture à notre célébration. Il donne aussi sens à l’évangile que nous venons d’entendre. L’événement de la résurrection de Lazare, mort depuis quatre jours, emprisonné dans une grotte fermée et figé dans ses bandelettes, Ézékiel nous annonce que cette résurrection est aussi la nôtre. Cette histoire est notre histoire parce que nous croyons que Jésus est la vie.
Dans cet évangile, il y a, me semble-t-il, deux histoires et les deux nous concernent. Une première est liée aux liens amicaux profonds qui relient Jésus à cette famille de Béthanie. Marthe et Marie font dire à Jésus : « Ton ami, celui que tu aimes est malade. » Quand finalement l’ami arrive, les deux sœurs lui font le reproche de ne pas être venu assez vite, manquant, en quelque sorte, au devoir de l’amitié. S’il était venu plus tôt, bien sûr, le grand ami aurait fait en sorte que les choses se passent autrement.
Puis devant le tombeau de l’ami, Jésus est gagné par l’émotion, il pleure. Et à nouveau le reproche, non plus seulement de la part des deux sœurs, mais de tous les proches et amis présents : Il aurait pu venir plus rapidement car l’amitié est capable de miracles. Surtout de la part d’un tel homme.
C’est à partir d’ici que nous commençons à saisir qu’il y a une seconde histoire dans cet événement. Jean l’évangéliste se sert de ce récit d’amitié, un peu mise en cause, pour nous affirmer que Jésus, l’ami de tous, est venu pour nous donner la Vie dès aujourd’hui. Dans la première histoire, Marthe parle bien de résurrection. Elle est même convaincue qu’il y aura résurrection au dernier jour. Elle ne la croit cependant pas possible pour aujourd’hui. Et même lorsque Jésus lui dit qu’il est la résurrection et la vie, elle lui répond : « Oui, je crois en toi, tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde. » Mais, elle me semble comme incapable de reconnaître qu’il peut ressusciter son frère aujourd’hui.
Marthe n’a pas foi en Jésus la Vie. C’est pour elle et tous ses semblables que nous sommes, que Jésus s’adresse alors à son Père devant le tombeau de l’ami décédé : « Père, je te rends grâce parce que tu m’as exaucé. Je savais bien, moi, que tu m’exauces toujours, mais si j’ai parlé, c’est pour cette foule qui est autour de moi, afin qu’ils croient que tu m’as envoyé. » Dès aujourd’hui, avant même sa propre résurrection, la vie qu’il redonne à Lazare témoigne qu’il est envoyé parmi nous pour vaincre la mort et recréer la vie.
Quelle vie, Jésus redonne-t-il à Lazare? Dans une toute petite phrase, Jésus dit simplement aux gens : « Déliez-le, et laissez-le aller. » D’un côté, Lazare a besoin des autres pour se libérer des bandelettes qui l’immobilisent, les mains et les pieds étant attachés. De l’autre, il ne pourra vivre que si ces mêmes gens qui le libèrent le laissent vivre, « laissez-le aller. » Vivre, c’est être aidé à vivre, mais aussi soi-même être libre de choisir de vivre. Voilà la vie que Jésus redonne à Lazare et qui devient notre tâche.
Au début de l’homélie, je vous disais que je trouvais deux histoires dans ce récit de l’évangile de Jean. Au terme, je vois qu’il n’y a qu’une histoire. L’amitié de Jésus ne se limite pas à deux ou trois amis qu’il a plaisir à rencontrer; cette amitié s’adresse à toute l’humanité avec qui Jésus veut nouer une alliance. Ainsi, toutes et tous trouveront confiance dans la vie, confiance sans cesse libérée grâce à la résurrection de Jésus, que préfigure celle de Lazare.