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14e Dimanche du Temps Ordinaire (B)
5 juillet 2015
Un regard ouvert sur le mystère de l’autre
Bruno Demers
Avez-vous lu Laudato si ? La dernière encyclique du pape François qui porte sur l’environnement. On en dit beaucoup de bien. J’ai été agréablement étonné de voir, au bulletin d’information à la télévision, la réception positive qu’on en a faite. On l’a saluée comme étant un document très courageux et inspirant. Vous avez aussi vu, comme moi, que certains hommes politiques, des candidats à la présidence américaine par exemple, la critiquait vertement en disant que le pape devait se contenter de parler de religion et non d’écologie ou encore de politique économique. C’est vrai qu’ils ont une idée bien arrêtée de la fonction papale.
« Fils d’homme, je t’envoie vers les fils d’Israël, ce peuple de rebelles qui s’est révolté contre moi. Ses frères et sœurs ne sont-ils pas de chez-nous? Et ils étaient profondément choqués à cause de lui. » Le rapprochement entre ces paroles et la situation que je viens tout juste d’évoquer se fait tout naturellement. Jésus est souvent perçu, dans l’Évangile, comme un prophète qui dérange. Ça ira d’ailleurs toujours en s’aggravant. Pourquoi? Parce que ce qu’il dit va contre les idées ambiantes, contre ce qui est communément admis autour de lui.
« N’est-il pas de notre village? On le connaît bien! » Et quand on connaît bien quelqu’un, on peut prévoir ce qu’il dira ou fera. On l’a comme catalogué dans notre esprit. On s’en est fait une idée depuis longtemps et on fonctionne avec celle-ci. C’est le danger qui nous guette quand on connaît bien quelqu’un. On comprend tout ce qu’il dit et fait en fonction de l’idée, de l’image qu’on s’en est fait avec le temps. Pour des raisons de commodité, on l’a mis dans une catégorie.
Les images toutes faites nous empêchent de découvrir de la nouveauté. « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa famille et sa propre maison. » On reproche à Jésus de dire la Parole de Dieu sans être qualifié pour cela. Il remettait en question les images préfabriquées que la société d’alors s’était faites de Dieu. Le chemin vers lui devait être balisé par la Loi et les 613 préceptes. Il fallait passer par les sacrifices du Temple pour se réconcilier avec Dieu. Ceux et celles qui ne pouvaient pas répondre à ces exigences étaient mis au ban de la société.
On s’était construit une image de Dieu et on n’en dérogeait pas. Plus de place pour de la nouveauté. Il aurait fallu faire appel à des actes de puissance, à des événements extraordinaires pour changer les perceptions. Or Jésus annonçait un Dieu très humain qui s’intéressait en priorité aux laissés pour compte. Un Dieu qui regardait l’intérieur avant l’extérieur. Un Dieu qui était sensible aux situations de misère des gens. Un Dieu miséricordieux, prêt à pardonner et à restaurer la capacité d’aimer.
Avec un tel Dieu, notre regard sur les autres est interrogé lui aussi. Nous sommes invités à reconnaître la part de mystère qu’il y a au plus profond de chaque personne. Même chose pour nous-mêmes d’ailleurs! Nous ne pouvons jamais nous faire une idée complète et toute arrêtée des autres. Il subsiste toujours une zone inconnue, imprévisible. Heureusement d’ailleurs sinon nous vivrions dans un monde où tout est déjà programmé, fixé, sans possibilité de nouveauté. Tout progrès dans nos relations interpersonnelles deviendrait alors impossible.
Le temps des vacances est un temps tout désigné pour se permettre de voir les autres autrement, pour découvrir de nouvelles facettes de leur mystère. Nous sommes invités à mettre de côté les images préfabriquées que nous nous sommes faites de ceux et celles qui nous entourent. En élargissant ainsi notre regard, nous découvrirons peut-être aussi de nouveaux côtés du Dieu dont Jésus nous parle dans l’Évangile.
Et nous espérons aussi que le pape François continuera de nous étonner, d’ébranler l’image qu’on s’est faite d’un pape afin de nous mettre en contact avec la fraîcheur de l’Évangile.