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27e Dimanche du Temps Ordinaire (B)

10 octobre 2015

 

Un amour désintéressé

Mc 10, 2-12

Bruno Demers

Bruno Demers

Pour le mettre à l’épreuve, des pharisiens lui demandèrent… Encore un piège tendu à Jésus! À l’époque, deux écoles d’interprétation s’affrontaient : Il était possible de répudier sa femme quand elle avait été infidèle ou, plus largement quand elle avait fait quelque chose qui déplaisait à son mari. De quel côté se situait Jésus? Limitait-il la répudiation à l’inconduite sexuelle? Ou l’étendait-il à tout ce qui contrariait le mari? Quand on se demande ce qu’est une société patriarcale, je crois qu’on en a un bon exemple ici!

Bruno DemersJésus ne tombe pas dans le piège. Sa réponse dépasse largement le plan strictement juridique. Il prend de l’altitude et remonte à l’intention même de Dieu lors de la création : « Au commencement, Dieu les fit homme et femme. À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme et tous deux deviendront une seule chair ».  Jésus prend en compte l’amour dans le couple et montre comment cet amour peut révéler l’amour même de Dieu pour les humains.

Au commencement du monde, il y a un être qui n’est pas bien dans sa solitude. Dieu crée donc les animaux pour lui tenir compagnie. Mais cela ne le comble pas. Alors le Seigneur Dieu façonna une femme de son côté, pour être à son côté. Quelqu’un donc qui lui corresponde. Du coup, l’homme s’exclame : « Tu es l’os de mes os et la chair de ma chair! » Autrement dit : « Tu es mon vis-à-vis! »

Il n’est pas bon que l’être humain soit seul. Celui-ci est un être de relations. Et c’est en étant en relation que l’être humain est l’image de Dieu. Il est appelé à aimer : « Il s’attachera à sa femme et tous deux deviendront une seule chair ». Le couronnement de la création des êtres vivants, c’est le couple humain. Et plus encore, l’amour humain comme trace,  comme écho du mystère de l’amour de Dieu pour nous. Dans la tradition juive, l’amour de l’homme et de la femme est le symbole même de l’alliance que Dieu veut nouer avec son peuple et avec l’humanité.

Avec Jésus, dans le Nouveau Testament, l’amour reconnu entre l’homme et la femme devient plus personnalisé. À l’attrait sexuel, à l’amour-eros, entre deux personnes, s’ajoute maintenant l’amour-charité. Autrement dit, au désir que nous avons pour l’autre,  qui fait que nous le ou la voyons en fonction de nos besoins et de notre satisfaction, s’ajoute maintenant la prise en compte de son altérité. Nous l’aimons pour lui ou elle-même dans une perspective de don, d’un amour plus désintéressé.

Ce que dit l’Évangile sur l’amour confirme ce que nous savons déjà de l’amour dès qu’il est un peu intense. Il n’y a pas d’amour sans excès, sans gratuité, sans perte, sans dépense. C’est la logique même de l’amour,  c’est-à-dire que la vie de l’autre devient plus importante que ma propre vie. Dans la perspective chrétienne, la gratuité de l’amour humain  devient une parabole lointaine du geste suprême de Jésus au soir de sa vie.

En effet, au Jardin des Oliviers, Jésus prie à l’écart. Il sait que les soldats s’en viennent. Il a encore le choix : partir, sauver sa peau,  face à toute la résistance et l’opposition que sa prédication a suscité ou renouveler son engagement à l’égard du Père : être fidèle à sa mission et accepter la tournure des événements jusqu’au bout. Avec  la révélation de l’amour de Jésus jusqu’à l’ultime limite, l’amour humain intègre l’amour charité dans une perspective de fidélité jusqu’au bout. . 

C’est aujourd’hui la fête de saint François d’Assise. C’est aussi la journée d’ouverture du Synode sur la famille. Nous avons devant les yeux le mystère des commencements, le mystère de l’amour de Dieu qui prend la voie du couple pour nous montrer sa fidélité. Que cette remontée à l’idéal de l’amour contribue à nous faire progresser sur ce chemin et nous aide à faire grandir le Royaume au sein de notre terre et au sein de notre histoire.

Bruno Demers

 

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal