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La Toussaint (B)
1er novembre 2015
« Sur la route des béatitudes »
Hubert Doucet
Nous avons débuté notre célébration en écoutant un passage du livre de l’Apocalypse que nous reprenons chaque année à la Toussaint. Ce livre est attribué à l’apôtre Jean. Pour nous modernes, la littérature apocalyptique évoque la catastrophe massive et violente. De fait, tout au début du texte, cette idée de destruction est bien là : quatre anges se préparent à dévaster la terre et la mer, nous faisant penser aux désastres écologiques d’aujourd’hui.
La véritable traduction du terme grec apocalypse est plutôt : révélation. C’est la révélation de Jésus-Christ. Alors que le texte laissait d’abord entrevoir un projet de destruction, de malheur sur le monde, c’est plutôt la vie et le bonheur qui éclatent. Et ce qui va se produire est étonnant.
La surprise, ce n’est pas tant les 144,000 qui proviennent de chacune des 12 tribus d’Israël. Aucune question ne se pose à leur sujet; ils sont marqués du sceau. On les reconnaît naturellement, ils sont de la famille, ils possèdent la bonne identité. Des semblables, quoi! L’étonnement, l’incompréhension même, elle vient de cette foule immense qui arrive de partout, portant des vêtements blancs avec des palmes à la main. Cette foule, elle est d’un autre monde, elle n’est pas marquée du sceau. D’où, tout de suite, l’embarras : « Comment peut-elle être sauvée? » s’inquiète-t-on. Le malaise est grand : « Qui sont-ils? D’où viennent-ils ? Comment le salut peut-il être donné à d’autres qu’à nous? »
Certains réservent le salut à un nombre limité. À l’inverse, Dieu reconnaît dans cette foule immense les saints, c’est-à-dire les hommes et les femmes qui, en ce temps-là, cherchaient à vivre au mieux leur humanité. Bien qu’étrangers à ceux marqués du sceau, ces hommes et ces femmes sont purifiés par le sang de l’Agneau.
Cette purification, cette sainteté, l’évangile de ce midi nous montre qu’elle se vit dans la pratique des béatitudes. Nous entrons ici dans un second niveau de réflexion et espérons que je réussirai à relier les deux textes de notre célébration.
L’évangile de Matthieu comprend neuf béatitudes. Quatre concernent la manière dont nous nous ouvrons à l’autre : entrer en relation de manière douce et pacifiante. Quatre autres portent, cette fois, sur les gestes concrets qui s’imposent à l’égard de l’autre : gestes de justice, de paix, de miséricorde. Mais qu’en est-il de la neuvième? Elle est d’un tout autre niveau.
La pratique des huit premières béatitudes conduit à la neuvième. Dans un monde de violence et d’intolérance, pratiquer l’ouverture et soutenir l’autre engendrent l’insulte, la persécution, l’ingratitude. À l’amour attentionné et miséricordieux répondent l’insulte et la haine. Mais pourquoi? Pourquoi faut-il passer par les pleurs et la souffrance? C’est là le cœur du mystère de l’humanité qui, souvent, nous rend hésitants à nous engager dans la pratique des béatitudes. Cet engagement des béatitudes, Jésus l’a vécu de manière tragique.
Bien des hommes et des femmes qui nous ont précédés et dont nous faisons mémoire aujourd’hui nous ont ouvert la voie en réussissant à intégrer le mystère de notre humanité. Nous leur en sommes reconnaissants. Bien des femmes et des hommes qui vivent encore aujourd’hui tentent aussi, à leur manière, de mettre en pratique ces béatitudes. Nous les admirons et nous disons parfois « C’est une sainte! ». « C’est un saint! »
Avec tous ces frères et sœurs, morts et vivants, mettons-nous sur la route des béatitudes à la suite de Jésus.