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30e Dimanche du Temps Ordinaire (C)
23 octobre 2016
Monique Morval
Commentaire pour ce dimanche
Je voudrais à mon tour vous raconter une histoire, une histoire vraie cette fois-ci…
Il y a deux semaines, j’assistais à un concert de l’OSM, à la Maison symphonique. Au programme, il y avait notamment des extraits de Roméo et Juliette de Prokofieff… S’assied à côté de moi une dame d’une quarantaine d’années, assez simple d’apparence. Elle engage la conversation :
On est loin ici : heureusement que j’ai pris mes lunettes. (Nous étions au balcon)
Oui, mais on entend bien quand même.
Est-ce que le concert va durer longtemps, 2h1/2?
Non : le programme indique la durée de chaque morceau et il n’y a pas d’entracte.
Est-ce qu’on va raconter l’histoire de Roméo et Juliette?
Non, on va entendre la musique du ballet qu’en a écrit Prokofieff.
Est-ce que l’histoire se trouve dans le programme?
Non, ce sont seulement des explications sur les airs que nous allons entendre. (Elle commence à m’énerver par son ignorance!)
Est-ce que vous connaissez l’histoire? (Comment ne peut-on pas connaître l’histoire de Roméo et Juliette!)
Oui, (et je lui résume les grandes lignes)
Vous, les Européens, vous en savez des choses…
Oups!
Je me suis sentie alors comme le pharisien de la parabole : quelle chance j’avais d’appartenir à un groupe qui connaissait ses classiques! Et sans doute que ma voisine a dû se sentir comme le publicain, qui venait d’un milieu moins éduqué où on ne lui avait jamais parlé de Roméo et Juliette.
Elle me dit ensuite qu’elle habite Mont-St-Hilaire et qu’elle est venue en métro. Elle participe toutes les semaines aux activités de la maison de la culture de son quartier… Ce qui a bousculé certains de mes préjugés à son égard. Rétrospectivement, je me suis dit qu’au lieu d’être énervée par ses questions, j’aurais dû admirer cette personne qui n’hésite pas à venir de Mont-St-Hilaire pour assister à un concert et qui participe aux activités de sa maison de la culture, et lui demander à mon tour de parler de ses intérêts…
Décidément, les temps n’ont pas vraiment changé depuis que Jésus a raconté cette parabole! Il y a toujours des personnes influentes, bien vues de nos concitoyens, qui savent ce qui est bon pour les autres et définissent les normes. Et de l’autre côté, des personnes humbles, qui pensent n’avoir aucune valeur, ce que la société reflète d’ailleurs à leur égard. Des personnes qui désirent s’en sortir pourtant: des mères qui participent à une cuisine collective pour donner le meilleur à leurs enfants, des itinérants qui vendent l’Itinéraire pour ne pas vivre de mendicité, des personnes comme ma voisine qui cherche à combler les lacunes d’une éducation partielle en participant aux activités de la maison de la culture et en venant au concert…
Bien malgré nous, nous sommes souvent amenés à juger les autres selon nos propres critères… Ben Sira le Sage, dans la première lecture, nous dit que « le Seigneur se montre impartial envers les personnes. (…) et que celui dont le service est agréable à Dieu sera bien accueilli ». Alors, si le Seigneur ne fait pas de différence, ne pourrions-nous pas faire de même?