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Épiphanie (A)
8 janvier 2017
Luc Chartrand
Tous les chemins partent de la crèche
Après une longue généalogie et le songe de Joseph, voilà que l’évangéliste Mathieu semble introduire une biographie. Il nous donne le nom de l’enfant et le lieu précis de sa naissance. Quant à la date, elle est indiquée par une référence au nom du roi, Hérode.
La biographie est interrompue par de la grande visite. Des dignitaires s’introduisent, au risque de retenir toute notre attention. Pourtant, ils ont pris la route, habités par un désir, trouver « le roi des Juifs qui vient de naître ». Une étoile vue à l’Orient conduit ces trois personnages à vouloir se prosterner devant ce roi. L’Évangile établit un lien entre la naissance de Jésus et le déplacement d’étrangers. Curieusement, ceux qui ne connaissent pas la révélation de l’Ancienne Alliance sont touchés par un événement qui, à première vue, ne les concerne pas directement. Encore plus étrange est de constater que les autorités religieuses et civiles ignorent cette naissance. D’un côté, nous avons trois mages ayant entrepris un voyage dont ils ne savent pas la destination. Ils sont tout simplement des migrants habités d’un désir. De l’autre, nous sommes en présence de sédentaires bien établis : un roi, des prêtres et des scribes, qui ont pour seule réponse la parole d’un prophète. Nous sommes introduits à deux façons différentes pour lire un événement. Il y a ceux qui scrutent les astres dans le ciel et ceux qui ont recours aux Écritures. Deux manières qui en viennent à collaborer pour résoudre l’énigme.
Pour nous, ce matin, la question se pose autrement. Nous aimerions bien connaître la raison de cette naissance de Jésus qui n’est pas connue du peuple juif, alors qu’elle est perçue en terre païenne sous la forme d’un signe. Le roi Hérode et tout son peuple bouleversés laissent entendre que les repères sont brouillés par l’apparition d’étrangers porteurs d’une nouvelle.
Bien que les Écritures permettent de trouver une direction pour trouver la réponse par une citation du prophète Michée, il n’y a pas une indication précise. Il s’agit d’un certain usage de l’Écriture, qui ne permet jamais d’entendre, mais conduit à lire et à reconnaître.
Ce matin, deux codes se juxtaposent dans une belle complémentarité : celui du Livre et celui des astres. Par la conjonction de ces deux approches du mystère, juifs et païens arrivent à apprivoiser l’espace et le temps du mystère de l’incarnation.
Chose étonnante, alors que les mages reprennent la route et que l’étoile reprend du service, le peuple d’Israël ne bouge pas.
À la découverte de l’enfant, les mages « se réjouirent d’une très grande joie ». Ce sentiment est bien différent du bouleversement d’Hérode et de son peuple.
Israël et les nations ne peuvent prétendre tout dire du mystère même s’ils sont associés pour une même quête. À la fin de l’évangile d’aujourd’hui, ce qu’il en ressort de cet enfant, tout comme du songe qui invite les mages à ne pas repasser par Jérusalem, échappe à notre maîtrise.
Si, comme les mages, nous venons nous prosterner devant l’enfant de la crèche, c’est pour nous relever et repartir par un autre chemin que celui qui nous y a conduits.
Les Écritures, les astres, ne sont rien si un désir ne les suit. Ils ne sont pas un code. Les Écritures attestent de ce qu’elles ne connaissent pas. Ce qui s’inaugure dans l’Évangile de ce matin n’est pas l’alliance d’Israël et des païens pour la création d’une humanité parfaite, mais le corps du Fils, principe d’un rassemblement nouveau, celui du Royaume!